Jean Dell

Jean Dell

"Autant attendre le boulot au vert"


COMÉDIEN, DIALOGUISTE, scénariste, écrivain, Jean Dell est installé dans le Pays d’Auge. Dans un écrin de verdure, au milieu des siens, entre Pont-L’Evêque et Lisieux, le proviseur de la série télévisée Clem, est dans son élément.


Vous étiez au festival de Cannes aux côtés de Nicole Kidman pour le film Grace de Monaco. Racontez-nous.


Tout se passe très vite à Cannes. C'est intense, fulgurant et ça vous laisse un peu, lorsque l'on en sort, comme un drogué en descente. Enfin je pense. Cela ne dure qu'un temps, on ne représente qu'un film. Une fois que votre équipe est passée, allez, vite, une autre, et surtout ne venait pas déranger les nouveaux, ce n'est plus votre tour. Sur trois heures de présence dont une heure d'embouteillage (rires), une heure et demi est consacrée à la projection. Il y a en plus le dîner et la boîte de nuit après. Tout ça, c'est formidable mais le lendemain c'est fini. On est à Cannes, pour un film, pour un moment et un temps bien précis. Et lorsque ce n'est plus à nous, on est quand même un peu jeté dehors.


La polémique qui a entouré la sortie du film vous a-t-elle dérangé ? 


C’est avant que l’on a eu un peu peur. Je me souviens en post-synchro, c’et-a-dire quand on se redouble à l’écran pour la version française, là on sentait bien qu’il y avait un problème mais pas avec les Grimaldi qui dès le départ, n’ont pas soutenu le film, plutôt avec le producteur américain.

Mais cependant Olivier Dahan a quand même tourné quelques scènes à Monaco.


Cinéma, télévision, théâtre, écriture, vous êtes un artiste multicartes. Pourquoi ?


Par la force des choses car lorsque l'on est plus demandeur que demandé, il faut se trouver du boulot. Moi j'ai tout de suite commencé à écrire des rôles, des sketches... Je suis vraiment multicartes oui. Je pense qu'un artiste doit avoir plusieurs métiers, sinon il ne tient pas. 


Comment expliquez-vous le succès de la série Clem et celui de votre personnage, le proviseur ?


Le succès est vraiment dû, je pense, à Victoria (Abril) et Lucie (Lucas) qui mènent de main de maître cette série depuis le début. Et aussi, bien sûr, grâce au talent des scénaristes qui racontent des histoires de famille avec des problèmes de famille. Des histoires sans gyrophare, sans un coup de feu. Il n'y a pas de sang, il n'y a pas de violence. Quant au succès de mon personnage, il tient déjà beaucoup à ma femme dans la série, Carole Richert, qui une comédienne formidable avec beaucoup de personnalité. Plus elle sur-joue, plus moi je suis en retrait. Du coup les téléspectateurs prennent parti pour moi. Je le vois bien dans la rue, je suis le proviseur, le mari de Marie-France, personne ne m'appelle Michel et les gens me disent : « Elle vous en fait voir, ça ne doit pas être facile ». Je passe un peu pour la victime de cette femme un peu folle et exubérante. 


Dans tous les personnages que vous avez incarnés à l’écran, y en a-t-il un qui vous plaît particulièrement ?


J'ai adoré faire le greffier dans Le juge est une femme. Le rôle de Lemonnier, maintenant me colle un peu à la peau. Dans la rue, outre le proviseur, les gens me reconnaissent aussi comme ça. Moi j'aime bien jouer les personnages un peu en retrait, un peu distingués, faux-cul, anglais, british... Je ne suis pas en rentre dedans, un vrai joueur de rugby. Je suis plutôt dans l'élégance, la distinction, le raffinement. Ceci dit, j'ai joué une fois un chauffeur routier communiste et j'ai adoré conduire un poids lourd (rires). Mais c’est vrai que l’on me cantonne plus dans les rôles de costume-cravate. Je ne sais pas pourquoi. 


Jouer dans une série à succès comme Clem vous prend-il beaucoup de temps ?


Non. On tourne cinq épisodes en quatre mois, et je dois être présent une trentaine de jours. Ça me laisse le temps de faire autre chose. Par exemple, j'ai fait un film pour France 3, Richelieu, avec Jacques Perrin. J'ai un projet de pièce avec Laurent Gamelon, et j’ai écrit un polar pour France 3 dont le tournage commence ces jours-ci.


Depuis combien de temps êtes-vous installé dans le Pays d’Auge ?


Nous nous sommes installés en 2009, mais venions ici depuis la canicule, en 2003. C’est un ami qui nous a fait connaître le Pays d'Auge en nous invitant un week-end dans sa maison de campagne à Courtonne-les-deux-Eglises. Et c'est comme ça que je me suis rendu compte que l'on pouvait vivre à la campagne - je déteste les embouteillages - et aller en train à Paris lorsque c’était nécessaire. J'ai vendu mon petit appartement parisien et on a acheté cette maison. On y venait de plus en plus tôt et en repartait de plus en plus tard. Alors on a décidé d’y habiter. C'est pas une petite décision à prendre mais je ne regrette pas. Quitter Paris, ça n'empêche pas de travailler. Il y a une vie en dehors de la capitale. Il y a une vraie vie ici. Paris c'est quand même beaucoup de béton. Je suis intermittent du spectacle, autant attendre le boulot au vert. Pourquoi je l'attendrais dans le béton ? C'est exceptionnel comme région, je ne le dis pas trop parce que tout le monde va venir (rires).


Quelles sont vos habitudes ici ?


J'ai mon petit rituel : j'écris tout les matins, installé dans ma véranda jusqu'à midi et demi, et après je vais à la piscine à Lisieux. Tout cela est très réglé. Avec ma femmes Christiane et nos enfants, nous fréquentons beaucoup Houlgate. On adore cette station balnéaire très familiale, moins parisienne que Trouville-Deauville où nous allons tout de même. Mais la plage, c'est à Houlgate et plutôt en fin d'après-midi. J'adore Lisieux. C’est une petite capitale. On trouve toujours de la place pour se stationner. Le marché est super achalandé. Il y a des réparateurs de tout, des toubibs compétents, un ophtalmo extraordinaire qui a encore de la place et c'est très rare. A Lisieux, il y a tout ce que j'aime dans une ville : de la belle fringue, de la belle chaussure, de bons restos et de l'animation. Que Lisieux meurt, c'est impossible, je n'y crois pas une seconde. 


Cette région vous inspire-t-elle dans votre travail ? 


Les relations humaines certainement oui mais pas les paysages, je ne suis pas peintre. Les relations entre l’homme et l’animal aussi. J’ai d’ailleurs un projet de pièce à deux personnages. C’est un type qui perd son chien et qui appelle son meilleur pote ministre pour lui dire. En plein conseil des ministres, il lui dit: « il est arrivé un truc très grave, viens vite ! ». et il ajoute: « j’ai perdu mon chien ». « Oh merde, en plus du truc très grave ? » 

Et cette idée m’est venue parce que l’on vit avec un chien. 




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