Le Prophète scrute l'horizon

Le Prophète scrute l'horizon.


DEAUVILLE. Le Prophète, l’œuvre monumentale du sculpteur Louis Derbré (1925-2011), a quitté au printemps dernier le parc de la fondation de l’artiste à Ernée en Mayenne pour rejoindre le jardin des lais de mer à Deauville. Du haut de ses 7,50 mètres, cet immense visage en bronze de 14 tonnes, achevé en 2008, a désormais le regard tourné vers le large.


Après l’installation de XY, sculpture du Deauvillais Philippe Valensi, cette nouvelle œuvre poursuit la promenade artistique qui mènera à terme des célèbres Planches jusqu’aux Franciscaines, l’objectif étant de créer un flux naturel vers le nouveau lieu de vie et de culture de la ville. Le Guetteur, autre sculpture de Derbré, en résine de 1,40 mètre de haut, fut quant à elle installée devant la Villa Namouna.


Le Prophète, dernière création monumentale de Derbré longtemps exposée dans les jardins du Luxembourg à Paris, était pour son auteur la réalisation d'un rêve d’enfant. «Elle dispense une propension à la méditation, un regard intérieur proposé à chacun, sur la portée de l'acte créateur et sa pérennité», disait-il à son sujet. «Elle est unique au monde, de par sa taille, mais aussi par le sens de son nom, qui traduit un désir d'annoncer une ère nouvelle. C'est la vision d'une porte toujours ouverte sur l’infini», expliquait l’artiste. Il lui a fallu tout un cheminement depuis le premier portrait en 1947, passant par diverses expositions aux quatre coins du monde et l'influence des tendances actuelles de l'art, pour revenir à l'essentiel. «Pour moi, seule l'écriture de l'enfant et la fraîcheur de son imaginaire, est bien le renouvellement de l’éternité.» Rien ne destinait ce fils d’agriculteurs à une vie d’artiste. Manœuvre dans une maison d’édition d’art parisienne, il croise presque par hasard des étudiants des Beaux-Arts. Leurs dialogues lui donnent envie de s’exprimer artistiquement. Il s’initie au métier. Premier succès en 1951, il reçoit le Prix Fénéon des mains de Louis Aragon pour la réalisation du buste d’un étudiant. Il aménage alors son premier atelier et devient l’assistant du sculpteur Emile Gilioli. En 1962, la galerie Hervé Odermatt à Paris, le révèle au grand public grâce à l’exposition Rodin, Maillol, Derbré.


Ce qui marque son parcours, c’est son souhait de rendre l’art accessible à tous et de développer un concept majeur pour lui : l’art dans la ville. Il répond à de multiples commandes en France mais aussi à l’étranger. Parmi ses réalisations, il faut citer La Terre, bronze de 9 mètres de hauteur installée sur la place Ikebukuro à Tokyo en 1972. Ou encore la réalisation de 6 sculptures monumentales de 5 mètres de hauteur pour le Mémorial de la Paix d’Hiroshima (1997). En France, ce sera entre autres, la grande exposition de la place Vendôme à Paris en 2000, composée de 35 sculptures.


Louis Derbré est décédé le 3 août 2011 à Ernée dans sa Mayenne natale où il s’était installé 10 ans plus tôt. Depuis sa disparition, le Fonds de Dotation qui porte son nom, perpétue son œuvre en France et à travers le monde, avec l’ambition de faire profiter de ses créations au plus grand nombre.


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