Teurgoule

La teurgoule, une recette de 300 ans


DU RIZ ROND, DU SUCRE en poudre, de la cannelle et une pincée de sel, le tout noyé dans du lait entier et cuit à four très doux pendant de longues heures. À l’origine, la préparation était placée dans les fours des boulangers, juste après la fournée, pour bénéficier d’une chaleur dégressive. La teurgoule est LE dessert normand par excellence. Au fil de la cuisson, le lait absorbe les grains de riz, les faisant fondre presque totalement dans une crème onctueuse parfumée à la cannelle. L’équilibre entre les ingrédients, le temps passé au four mais aussi le tour de main ont, c’est une évidence, une incidence sur l’aspect crémeux de la préparation. 


L’autre particularité de la teurgoule, c’est le plat dans lequel elle est cuite. Traditionnellement en grès ou émaillé, ce qui garantit une répartition optimum de la chaleur, c’est un ustensile que l’on trouve dans toutes les bonnes cuisines normandes. Tourné à la main selon une technique quasiment disparue en France, il est encore fabriqué artisanalement dans les dernières poteries de Noron-la-Poterie, non loin de Bayeux. Il en existe plusieurs tailles. Le plus grand mesure 37,5 cm de diamètre et 18 cm de hauteur pour une contenance de 10 litres. Ce plat est aussi appelé jatte ou terrine, d’où le nom parfois donné à la teurgoule : la terrinée.

L’histoire de ce dessert remonte au début du XVIIIe siècle. C’est l’intendant de la Généralité de Caen, François Orceau de Fontette (1718-1794), nommé par Louis XV en 1752, qui en serait à l’origine.

En 1757, alors qu’une disette s’est abattue sur la Normandie, l’intendant Fontette aurait fait venir une cargaison de riz afin d’éviter des émeutes populaires. Peu accoutumés à cette céréale quasiment inconnue en France à cette époque, les Normands se virent proposés une recette afin de la cuisiner avec du lait que la région offre en abondance.


Le bateau chargé de riz et réquisitionné par Fontette, aurait en fait été une prise corsaire débarquée dans le port d’Honfleur. Tout comme la cannelle, la céréale faisait partie du butin capturé sur les galions espagnols en provenance du Nouveau Monde. Une hypothèse d’autant plus probable que la disette en question se situe au début de la guerre de Sept Ans (1756-1763) qui opposait une fois encore, la France à l’Angleterre. Les corsaires normands capturèrent plusieurs navires adverses arrivant d’Amérique.

L’origine du nom viendrait de « se tordre la goule » (la bouche en patois normand) lorsque l’on mangeait la teurgoule dont les premières versions n’avaient pas encore atteint le moelleux d’aujourd’hui. D’autres affirment que c’est parce qu’on se dépêchait de la manger alors qu’elle était encore très chaude ce qui entraînait chez le gourmand une grimace mémorable. 


La teurgoule se déguste en dessert ou à la collation avec de la fallue, une brioche plate fabriquée elle aussi en Normandie dès 1897, accompagné d’un verre de cidre bien sûr. La Confrérie des gastronomes de la teurgoule et de la fallue de Normandie, organise chaque année à Houlgate le concours de la meilleure teurgoule et de la meilleure fallue.


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